Chaque émotion est porteuse d’un signal qui permet d’agir en fonction de la situation vécue. Les émotions sont sources d’informations précieuses dans toutes les situations de notre vie quotidienne et il est dangereux de les ignorer et de ne pas y prêter attention.
Dans notre société, les émotions sont mal acceptées ou à défaut font peur. La tristesse est perçue comme un état dépressif, la colère comme une agression, une peur comme un état anxieux, la joie, elle, peut paraître douteuse et ressentie comme de l’inconscience ou de l’insouciance.
La plupart des gens pensent que gérer ses émotions signifient les dompter, les contrôler, les refouler et surtout, ne pas les ressentir. Notre éducation (scolaire et parentale) ne nous a pas appris à saisir nos émotions et les utilisés à notre avantage. En cachant les émotions spontanées ou en les déguisant pour nous rendre conformes et socialement acceptables, nous perdons des informations précieuses sur notre vécu psychique. Nous devenons aliénés en adoptant une personnalité inconforme à notre nature propre.
Le déni des émotions a une fonction de protéger une personnalité construite sous la pression des circonstances ou la recherche d’acceptation ou d’approbation des autres et par extension, de la société.
Malheureusement, c’est notre mental qui a reçu l’essentiel de notre formation. Mental, non par le fonctionnement de notre cerveau mais par de l’apprentissage d’un programme classique, technique, historique. Notre intelligence émotionnelle n’a été que très peu encouragée, sollicitée, voire pas du tout.
A mon avis, et ceci n’engage que moi, l’apprentissage du mode de fonctionnement individuel de notre cerveau, de nos émotions et nos perceptions devraient être prioritaires dans notre système éducatif. Certes, notre éducation de manière générale nous permet d’avoir une culture générale sur un nombre important d’éléments externes à nous-mêmes, mais il manquerait le rapport à soi pour tendre vers une éducation plus complète.
Les émotions ne surgissent pas dans nos vies sans raison. Chaque émotion a une fonction, une information utile à nous transmettre sur notre vécu. C’est pourquoi « gérer ses émotions » n’implique pas de les contrôler et de les combattre mais au contraire, de savoir les accueillir et tenir compte du message qu’elles véhiculent.
L’intelligence émotionnelle désigne notre capacité à reconnaître nos propres sentiments, à maîtriser nos sentiments en nous-mêmes et dans nos relations à autrui. Etre conscient, c’est savoir ce qui se passe maintenant au niveau de nos émotions. Grâce aux émotions, nous pouvons connaître nos points sensibles : elles nous signalent une fragilité en nous. Elles font raisonner en nous, le travail qui n’a pas été encore fait et nous indiquent dans quelle direction prendre pour solutionner cette fragilité. En fait, les émotions permettent de nous signaler, l’endroit où nous avons été touchés à vif.
Décoder une émotion permet d’analyser le signal qu’elle contient de comprendre aussi, le message sous-jacent qu’elle désire exprimer, et ensuite de poser une action dans le sens du message.
La prise de conscience de l’émotion et l’identification de ce qui la déclenche offrent à l’émotion un canal d’expression. L’espace intérieur bloqué par l’émotion se libère, la pensée reprend un cours plus serein et le corps retrouve une fluidité de mouvement libéré des tensions. L’émotion ne nous envahit plus malgré nous.
Quelques exemples d’émotions et brièvement quelques messages sous-jacents possibles :
La colère sert à chasser les intrus, à poser ses limites et à se faire respecter. Elle sert à dégager notre territoire mais elle n’est pas faite pour envahir celui des autres. Il est crucial de garder à l’esprit que les ennuis commencent quand le besoin d’être aimé devient plus fort que le besoin d’être respecté.
La culpabilité est une émotion que l’on ressent quand on en veut à soi-même, quand on est fâché contre soi-même d’avoir agi ou d’être de telle ou telle façon. La culpabilité se réfère à nos actes, nos comportements et nos pensées qui nous disent que ce que l’on a fait est mal. Comme toute émotion, la culpabilité que nous ressentons provient de nos pensées et non des évènements ou de ce que nous avons fait ou pas.
La peur quant à elle est une émotion positive puisqu’elle nous permet de nous avertir d’un danger et de s’en protéger. Le cerveau reptilien nous prépare à la fuite ou à la lutte. Elle se manifeste physiquement : tremblement, palpitation cardiaque, sueur et notre organisme met en fonction tout notre mécanisme de survie instantanément face à un danger. Cependant, la peur peut être une émotion d’anticipation qui nous informe d’un danger à venir. Elle est créée à partir de nos scénarii mentaux, de notre imagination d’une certaine forme de menace. Il existe 2 formes extrêmes de peur : la peur de la vie et la peur de la mort.
Le fait même d’exister exige tellement de nous, qu’en soi, ce peut être effrayant. Ceci entraîne la peur de ne pas être à la hauteur et de ne pas pouvoir satisfaire les exigences de la vie. Cette peur peut se manifester soit par l’incapacité à s’engager (peur de l’échec) soit par être constamment à la recherche de nouveaux commencements. Dans les cas extrêmes, inconsciemment, la peur de vivre peut se traduire comme un désir de mourir qui se traduit pour certains, par des activités qui mettent en jeu leur vie.
La peur de mourir est à l’origine de presque toutes les peurs. Elle induit l’immobilisme, un contrôle excessif et un chemin conventionnel parfaitement banalisé de notre vie. Notre vie est alors restreinte et étriquée, remplie de contraintes et de stress occasionnés par la volonté d’éviter la mort.
Nous avons tous expérimenté l’envie qui se manifeste par les désirs d’amour, de gloire, de richesse ou de beauté incarnés sous nos yeux. Nous devenons horrifiés avec le sentiment qu’une autre existence puisse jouir de ses bienfaits et que notre existence est trop minable. Par conséquent, l’estime que nous nous portons prend un coup et s’affaiblit. La vie de tous les jours nous amène à faire des comparaisons, à émettre des jugements, et à nous affirmer vis-à-vis des autres. Un équilibre s’établit entre l’estime que nous portons aux autres et l’estime que nous nous portons à nous-mêmes, et pour notre sérénité quotidienne, nous nous efforçons de garder cet équilibre stable. Cet équilibre est rompu par l’envie, il s’agit d’un sentiment destructeur mais paradoxalement humain. Cet envie a le mérite de signaler un problème et nous invite à nous rendre des comptes au sujet des rêves et des objectifs que nous nous étions fixés. C’est un point de rencontre avec nos possibles oubliés, refoulés. Parfois, il est possible d’éviter de fréquenter certaines personnes qui se sont réalisées par peur de manifester en nous cette envie refoulée. Quand nous avons fait un choix, nous avons dû éliminer les autres possibilités. Par ailleurs, l’envie permet de mieux se connaître, d’être d’accord avec ses choix de vie ou de commencer à réaliser ses rêves. L’envie est un sentiment très utile pour guider nos choix. Les antidotes à l’envie sont le courage, le sens de la compétition et de la justice, et surtout la conscience de notre propre valeur.
La jalousie est une émotion complexe, où se mêlent peur, colère, tristesse, honte, douleur au niveau de la poitrine. Il s’agit d’un sentiment naturel avec un mélange de plusieurs émotions. Lorsqu’elle est refoulée trop longtemps, elle peut exploser en un flot émotionnel ingérable, mêlant amour et colère d’être ainsi traité, envie et jalousie parce que l’aimé donne son affection ou de l’intérêt à quelqu’un d’autre, humiliation et impuissance, rage et déception. Dans ce cas précis, la colère se manifeste par de la frustration et de l’impuissance ; la peur se manifeste par des sentiments d’abandon, de trahison, de perte ; la tristesse se manifeste par l’atteinte de l’estime de soi, la dévalorisation, la comparaison, la déception, le rejet, l’humiliation ; la honte se manifeste par la honte d’être perdant et d’être jaloux. Certains partenaires trouvent un intérêt à rendre l’autre jaloux. Cela leur permet d’attirer l’attention sur eux et de vérifier le prix que l’autre attache à la relation. Cela nourrit également leur besoin de reconnaissance, leur besoin de plaire ou encore leur peur de vieillir et de prouver ainsi qu’ils sont encore désirables par d’autres.
L’anxiété est une inquiétude qui naît de l’incertitude d’une situation, de l’appréhension d’un événement. Cette émotion apparaît dans la majorité des cas dans des situations qui échappent à notre contrôle. Elle est liée à l’atteinte d’un but et se manifeste quand nous devons faire face à l’inconnu. Elle est aussi liée à des situations où on est confronté à des situations inhabituelles. Dans notre éducation, nous voyons l’anxiété comme quelque chose de négative mais elle fait normalement partie de l’expérience humaine, et essentielle à la réussite et nous permet de faire face à de nouveaux domaines qui vont nous faire changer ou évoluer. L’anxiété relève de nos pensées quant à la possibilité ou pas, de pouvoir gérer les situations. L’intensité de l’anxiété varie en fonction de l’importance de l’enjeu qui se présente à nous.
Le sentiment de tristesse apparaît en réaction avec une perte d’un être cher, séparation longue, rupture ou décès. Mais cela peut être aussi la perte d’une illusion (désillusion), d’un rêve ou tout objet valorisé et chargé d’affect (biens matériels, statut social, retraite, licenciement). Il s’agit de l’émotion naturelle devant une perte, un échec, un deuil… La tristesse est une émotion inévitable dans une vie vu que nous perdons un tas de choses : la beauté, la jeunesse, les parents, les amis, les emplois, les possibilités, les mobilités, l’amour et pour finir la vie elle-même. La tristesse peut porter plusieurs couleurs variées à savoir la déception, la nostalgie, le découragement, la consternation, le désespoir, le chagrin, la peine. Pour accepter toutes ces disparitions, nous les pleurons jusqu’à ce que nous soyons prêts à nous en détacher. Le but de la tristesse ou chagrin est de nous faire passer au niveau supérieur à celui dans lequel nous étions avant de perdre ce que nous pleurons. Métaphoriquement, le chagrin est comme un tunnel obscur qu’il nous faut traverser avant de réapparaître soudain à la lumière. Il s’agit d’un passage de transition qui prépare à une situation nouvelle. Elle permet de clore une période de vie et de pouvoir tourner la page sereinement. La tristesse ne survient que pour ce qui nous a donné de la joie. La tristesse est alors proportionnelle à la joie initiale.
La tristesse est une émotion souvent redoutée parcequ’elle est confondue avec la dépression. Les pleurs d’une vraie tristesse sont brefs et soulagent. Les larmes de la dépression entretiennent un état morbide. La vraie tristesse a une fonction positive, la dépression nous enferme dans une spirale négative. La tristesse est un des ingrédients de la dépression. La tristesse est une émotion normale, qui fait partie du répertoire des émotions d’une personne en bonne santé. La dépression est une maladie associée à une tristesse intense, tenace, accompagnée d’une dévalorisation de soi, d’un sentiment de perte d’espoir, de fatigue et d’autres sentiments associés.